Structure circulaire de la sourate « La vache » (Al-baqarah)

La deuxième sourate du Coran, intitulée « La vache » ou « La génisse »  (Al-Baqarah), est la plus longue du Coran, avec 286 versets. Cette sourate est réputée éloigner les démons [shayātīn], notamment son 255^ème verset, le verset du Marchepied (āyatou-l-Kourssī) sur lequel nous reviendrons.

Ce chapitre recèle une structure très élaborée, sous forme de boucle ou de chiasme (construction en miroir : A-B-C // C-B-A). Ce fait est inconnu d’une très grande partie des musulmans.

La sourate est ainsi construite autour de ces thématiques :

1) Versets 1 à 20 : Croyance et mécréance.

2) Versets 21 à 39 : La création réalisée par Allāh  et Sa connaissance de toutes choses (ici, à propos du péché originel d’Ādam  et Hawā’ ).

3) Versets 40 à 103 : Délivrance de la loi divine aux fils d’Israël [banī Isrāīl] par Moūssā .

4) Versets 104 à 141 : Les épreuves d’Ibrāhīm  (détails sur la construction de la Ka‛bah par Ibrāhīm  et son fils Ismā‛īl , réponse aux gens du Livre)

5) Versets 142 à 152 : La Ka‛bah (temple construit pour adorer Allāh, par Ibrāhīm  et son fils Ismā‛īl , à la Mecque) qui devient la nouvelle orientation de la prière [qiblah]. C’est une épreuve pour les musulmans : auparavant, ils priaient comme les juifs en direction Jérusalem, et à présent, ils doivent affirmer leur différence en priant en direction de la Mecque ; injonction aux croyants de se concurrencer dans le bien.

6) Versets 153 à 177 : Les épreuves des musulmans ; détails sur la Ka‛bah, les collines Safā et Marwah de la Mecque, réponse aux polythéistes.

7) Versets 178 à 253 : Délivrance de la loi divine aux musulmans.

8) Versets 254 à 284 : La création réalisée par Allāh  et Sa connaissance de toutes choses (ici, à propos de l’aumône et des transactions).

9) Versets 285 à 286 : Croyance et mécréance ; piliers de la foi et invocations.

En étudiant cette structure, on s’aperçoit que la sourate est construite sous forme de boucle, comme l’illustre ce schéma :

De plus, chaque section comporte également une ou plusieurs structures en boucle :

Ce deuxième chapitre du Coran suit donc un déroulé très précis, et une logique interne s’y dessine. Notons que les 286 versets de cette sourate ont été révélés dans le désordre, pendant plusieurs années, à la suite d’événements qui se sont déroulés du vivant du prophète Mouhammad ﷺ. L’essentiel de la sourate a ainsi été révélé les deux premières années suivant l’émigration (entre 622 et 624 environ) ; ce moment était opportun, car l’émigration à Médine fonde le début de la société musulmane, or la sourate « Al-Baqarah » pose beaucoup de règles concernant la vie en communauté.[1]

Toutefois, certains passages, notamment les règles concernant l’usure, n’ont été révélés qu’à la fin de la vie de Mouhammad ﷺ (vers 632). À l’opposé, les trois derniers versets (284 à 286) furent révélés avant l’Hégire.

Dans ce même temps, de nouvelles sourates étaient révélées, tandis que Mouhammad ﷺ devait se souvenir des versets qu’il avait déjà déclamés…

La tâche paraît bien ardue… pourtant, le chapitre « Al-Baqarah » se distingue par sa structure très élaborée, alors qu’on pourrait s’attendre à une composition anarchique, sans ordre bien clair. De plus, cette sourate aborde des thèmes complexes, notamment les histoires des prophètes Moūssā (Moïse) , Dāwoūd (David)  et Djāloūt (Goliath), ‛Īssā (Jésus) , Ibrāhīm (Abraham)  et son fils Ismā‛īl (Ismaël) . Le texte légifère aussi dans des domaines variés, comme la charité, les prêts et les dettes, le testament… La richesse des thèmes abordés s’accorde ici avec la prouesse stylistique, formant un ensemble parfaitement cohérent et harmonieux.

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[1] A contrario, les sourates pré-hégiriennes étaient souvent axées sur le dogme et la croyance authentique en Allāh ; l’enseignement théorique précède la pratique.